Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Les réflexions de Djidda

La sécurité collective

23 Avril 2011 , Rédigé par Les réflexions de Djidda

Les défis liés à la sécurité internationale

S’il fallait résumer l’évolution du Droit International, il semble bien que ce dernier se soit employé à limiter la puissance des États, que ce soit par le développement des mécanismes de sécurité collective, ou par la montée des interdépendances dans le cadre d’un mouvement de multilatéralisation et d’institutionnalisation de la vie internationale.

Aussi, le droit international joue un rôle dans un triple registre. Il est d’abord le porteur de l’interdiction, exprimant un choix idéologique en faveur de la paix. Ensuite, corollaire de l’interdiction, les changements ne peuvent plus être obtenus que par l’accord. Cela concerne le droit lui-même, mais aussi les différends qui doivent être réglés pacifiquement. Enfin, où la place du droit est cependant plus ambiguë : l’interdiction est assortie d’un mécanisme de garantie institutionnelle, sous la forme d’un système de sécurité collective qui, après les échecs de la Société des Nations, prend la configuration juridique et institutionnelle actuelle en s’articulant sur l’Organisation des Nations unies (ONU). Le discours de Georges Bush en mars 1991, se référant au « nouvel ordre mondial » et évoquant « une nouvelle entente entre les nations » fondée sur la coopération et l’action commune, en est une illustration.

La création de l’Organisation des Nations Unies et la mise en place de la sécurité collective demeurent, ne serait-ce que pour des raisons juridiques, le point de départ obligé de toute réflexion sur la sécurité internationale. Plus de soixante ans après l’adoption de la Charte, sa logique n’a pas été épuisée car les principes sur lesquelles elle se fondait, s’ils ont fortement évolué, n’ont pas été sérieusement remis en cause. Ainsi, la Communauté fondamentalement interétatique de l’origine s’est progressivement élargie à une Communauté internationale qui n’était qu’en gestation lors de l’élaboration de la Charte. Toute fois, la sécurité collective récuse l’idée de la domination des petits par les grands. Elle écarte l’idée que des grandes puissances en nombres restreint pourraient, soit unilatéralement, soit collégialement, régler le sort des autres sans leur participation. Mais, ne méconnait pas pour autant l’inégalité de puissance entre Etat et elle est compatible avec un rôle d’entraînement, de moteur, reconnu à certains d’entre eux, dans une logique de leadership.

Les fonctions du concept

A ce titre, la sécurité collective s’inscrit parmi d’autres concepts, qui ont été ou sont encore pratiqués parallèlement, et qui sont à la fois des théories du maintien de la paix et des systèmes de sécurité. Ainsi en est-il de l’équilibre, cher au Royaume Uni puis devenu le concept dominant de l’Europe classique, à savoir la dissuasion nucléaire. Comme tout autre système, la sécurité collective comporte des règles du jeu. Il faut que les partenaires jouent suivant les mêmes règles, qu’ils aient les mêmes attentes à son égard. Alors, là encore comme tout autre système, la sécurité collective doit remplir cumulativement, trois fonctions :

Une fonction dissuasive, qui est invisible : lorsque le système fonctionne, par son existence même, il dissuade les partenaires de recourir à la violence armée, parce qu’elle serait improductive, vouée à l’échec, que l’option guerrière devient irrationnelle et donc fermée. C’est ainsi que, selon le principe de l’équilibre, il est absurde de recourir à la guerre lorsque les camps sont de force équivalente,

Une fonction préventive, qui est pacifique, passe par la diplomatie, même si elle peut également comporter des mesures coercitives mais sans emploi de la force armée. En cas de menace contre la paix, on agit de façon à désamorcer les tensions, par des négociations, voire des pressions appropriées, mais toujours dans un registre pacifique.

Une fonction correctrice, ou coercitive : en cas d’atteinte à la paix ou de rupture de la paix, qui est en soi un échec du système, il implique que les fonctions précédentes n’ont pu s’exercer, la sécurité collective se trouve mise au défi de corriger ou de redresser elle-même ses propres lacunes. Cela suppose, un recours à la force armée contre ceux qui ont défié le système ou en sont sortis.

On aperçoit aussitôt, ou du moins, une ambiguïté dans les systèmes de sécurité : qui comportent tous comme ultime sauvegarde la possibilité du recours à la force armée, de sorte que la sécurité s’oppose à la paix, et le conflit armé devient l’ultime recours de la sécurité. C’est là comme une fatalité des systèmes de sécurité que de se transformer, poussés à leur extrême logique, en justification de la guerre, mais cela vaut pour tous, et pas seulement pour la sécurité collective.

Aussi, la sécurité collective implique la participation de tous à l’élaboration des règles qui les lient et consentent à leur contenu. Elle tient compte à la fois de l’égalité juridique entre Etat et de l’inégalité concrète de leur capacité d’action. En somme, ce qui est recherché, c’est une défense collective davantage que la sécurité collective ; car la sécurité collective repose sur un compromis entre des aspirations contradictoires, tout en proclamant le droit à une sécurité égale pour tous les Etats.

Nouveau consensus sécuritaires du 21é siècle

Le principal défi en ce début de 21e siècle est de parvenir à une nouvelle conception de la sécurité collective, plus large et combinant, les engagements, la responsabilité, la stratégie et les institutions qui doivent entrer en jeu pour que ce système soit efficace et équitable. De ce fait, pour dégager un nouveau consensus sur la sécurité, il faut que le premier intervenant devant les menaces, reste l’Etat souverain. Plusieurs raisons plaident en faveur de la sécurité collective ; puisque les menaces actuelles ne connaissent pas de frontière, elles sont liées entre elles et nécessite une action concertée. Aucun Etat, si puissant soit-il ne peut seul se mettre entièrement à l’abri des menaces actuelles et on aurait tort de penser que tous les Etats seront en mesure d’assumer leurs responsabilité, à savoir protéger leurs citoyens et ne pas nuire à leur voisins.

L’image qui s’impose est, bien évidemment, celle du 11 septembre. Elle témoigne non pas de la mondialisation de la sécurité mais de la mondialisation de l’insécurité. L’insécurité est effectivement mondialisée en ce sens que le risque est commun. Un nouveau dilemme de sécurité fait ainsi son apparition, opposant sur la scène internationale des acteurs étatiques à des acteurs non étatiques et transcendant les frontières comme jamais auparavant. La mondialisation de la sécurité correspond en réalité à la mondialisation des nouveaux risques ; et par voie de conséquence, à la mondialisation des réponses étatiques.

Il est vrai que la Charte de l’ONU, dont elle est la référence implicite, permet de les surmonter en partie, puisqu’elle en présente la construction positive contemporaine, offrant un cadre concret pour son analyse et son évaluation. Tentative ou entreprise de construction seraient au demeurant plus exacts. Nombreux sont ceux qui considèrent qu’elle est marquée par l’échec, par l’incapacité de préserver ou de rétablir la paix internationale. Car la pratique de la sécurité collective dans le cadre des Nations Unies a connu nombre de vicissitudes, qui ont plutôt entraîné son adaptation à la baisse. On peut dès lors s’interroger sur son avenir, soit dans le cadre de l’Organisation, soit dans un cadre renouvelé, élargi ou diversifié.

 Mahamat DJIDDA

Master II - Droit International et Relations Internationales

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article